LES CREATIONS DE JEAN-DOMINIQUE MARCANGELI

La mer a toujours fasciné les hommes. Il est vrai qu'elle cache des trésors de rêves dans ses abysses. Elle est comme un immense kaléidoscope riche de ses poissons multicolores, de ses algues, de ses plantes extraordinaires, de son corail et de ses coquillages. Ces derniers n'ont-ils pas conquis Aristote et Pline l'Ancien qui ont passé une part de leur vie à les étudier, à les décrire.

Jean-Dominique Marcangeli, îlien puisque Corse, s'est toujours senti en osmose avec la mer. Il a commencé à lui rendre hommage avec les bois flottés qu'il allait lui-même ramasser dans les criques insulaires. Il s'attachait à leur donner vie en les concevant comme de véritables oeuvres d'art. Un peu à la manière de Lucien Clergue dont les photos de bois flottés de la terre d'Arles ont fini par franchir la porte des musées et celle des plus grands collectionneurs.

Jean-Dominique Marcangeli ne renie pas sa période de bois flottés, mais depuis quelques années maintenant, il a trouvé une autre forme d'expression à travers les coquillages venus d'ici et d'ailleurs. Il leur a fait prendre une forme nouvelle en les rassemblant, en les recomposant. Il est devenu l'alchimiste de créations à la fois surprenantes, fascinantes et féeriques. Des oeuvres qui feront peut-être un jour leur entrée au Musée du Coquillage de Saint-Jean Cap Ferrat.

Le coquillage est apparu dès la naissance du monde, il est donc par nature quasi mythique. La démarche de Jean-Dominique Marcangeli a été de lui donner une forme nouvelle jusqu'à en faire un masque de comédie.

Jean-Dominique Marcangeli rend ainsi aux coquillages leurs lettres de noblesse. Minutieusement triés, en fonction de leur taille, de leur forme, de leur couleur, patiemment assemblés, ils deviennent des bouquets généreux, rassemblés en symphonie fantasque, dont l'harmonie est extravagante. Nacré, irisé, doré, zébré, marbré, rosé, ondulé: les effets de surface et les teintes apparaissent infinis. Ses créations sont parfois agrémentées de gorgones, de corail, le feu d'artifice devient alors gracieux et magnifique.

Influencé par le style baroque né en Italie à la charnière du XVIème et XVIIème siècles - qui se caractérise notamment par l’exagération du mouvement, la surcharge décorative, les effets dramatiques, la tension, et l’exubérance - ce créateur, passionné d'art et d'objets anciens fait naître ainsi dans son atelier d'Ajaccio des pièces extraordinaires qui trouvent toute leur place dans les cabinets de curiosités.

Jean-Dominique Marcangeli qui a appris à se jouer des contraintes, travaille aussi à confectionner des bustes, des masques ou encore des grotesques, en coquillages avec la même virtuosité que Giuseppe Arcimboldo, peintre de la Renaissance, auteur de portraits caricaturaux ou allégoriques formés d’une juxtaposition de fruits, légumes et végétaux, symbolisant les saisons.

Face à ses créations, une question revient tout naturellement à l'esprit: les objets inanimés ont-ils une âme ? La réponse ne laisse pas de place au doute

Jean-René LAPLAYNE